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Protests at the Whitney Over a Board Member Whose Company Sells Tear Gas

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Protesters chanted and held banners in the lobby of the Whitney Museum on Friday night.CreditAndrew White for The New York Times

Protesters chanted and held banners in the lobby of the Whitney Museum on Friday night.
Protesters chanted and held banners in the lobby of the Whitney Museum on Friday night.CreditCreditAndrew White for The New York Times

Visitors who arrived at the Whitney Museum of American Art on Friday night to view the works in this year’s politically tingedBiennial had to pass by a raucous demonstration that was not part of the official programming.

About 200 people squeezed into the Whitney’s lobby, in the ninth of a series of weekly gatherings to protest a museum board member whose company sells tear gas that activists and the art publication Hyperallergic said had been used on migrants at the Mexican border.

It was the most recent episode in a prolonged public debate — involving letters and pronouncements by museum employees and officials, scholars, artists and art critics — over the board member, Warren B. Kanders, and his company, Safariland.

According to Hyperallergic, photos showed tear gas canisters marked with the company’s name at a site where the American authorities used tear gas last fall to disperse hundreds of migrants running toward a crossing that leads from Tijuana to San Diego.

Protesters outside the museum and in the lobby on Friday night beat drums, blew horns, chanted and brandished signs like one that read “Warren Kanders Must Go.” Some made it to an upper floor, where a black banner was draped from the building, reading, “When We Breathe We Breathe Together.”

There was even a rolling installation that seemed custom made for the occasion, in the form of a five-foot-tall silver-colored cylinder on wheels replete with a wire pull ring and emblazoned with the words “tear gas.”

An organizer with the group Decolonize This Place, which called for the weekly protests, read from a message to the Whitney’s director, Adam Weinberg, and its board of trustees demanding they remove Mr. Kanders from the board.

“We could have shut the museum down today,” the organizer, Amin Husain, shouted in the lobby. “But after nine weeks of action we offer the museum leadership a window to do the right thing.”

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CreditAndrew White for The New York Times

The Whitney Museum declined to comment.

Ticket holders passed by, gazing quizzically. Some paused to listen or to accept copies of the message that Mr. Husain was reading from. One woman shook her head and waved a hand when offered a copy. Museum employees stood by and watched the protest, but did not try to stop it or to prevent anyone from entering the lobby.

Last year dozens of museum employees wrote a letter to express their “outrage” over reports that Safariland gas had been used at the border. Mr. Kanders then wrote a letter saying he took pride in the company. He added that Safariland made equipment, like body armor, that helped protect people and that it had no control over how its products were used.

In a letter, Mr. Weinberg said that he respected “the right to dissent.” But the Whitney, he added, is “first and foremost a museum” that “cannot right all the ills of an unjust world.”

Several art critics, academics and others followed with a letter calling for Mr. Kanders’s removal. Last month about two-thirds of the 75 artists and collectives chosen for the Biennial also signed the letter.

One of the Biennial participants, the London-based research agency Forensic Architecture, entered as its exhibition a 10-minute video called “Triple-Chaser” with Praxis Films, run by the filmmaker Laura Poitras, about a type of tear gas grenademanufactured by Safariland.

After about an hour in the museum lobby, the protesters filed out and began marching through the West Village, accompanied by a contingent of police officers.

The roving demonstration halted on a tree-lined block outside a red-brick townhouse that the protesters said belonged to Mr. Kanders. Outside the residence, the chants continued. “Your time is up,” one woman shouted. Another woman burned a bundle of sage near the home, as if to ritually cleanse the premises.

A man distributed fliers addressed to residents of the block “and everyone in New York City” that listed the address of the building said to belong to Mr. Kanders and contended that his company’s tear gas had been used on migrants at the Mexican border, on Palestinians in Gaza and on protesters in Baltimore and Ferguson, Mo.

As rain arrived, the ranks of the crowd thinned, and soon a final chant went up: “We’ll be back.”Correction: May 18, 2019

An earlier version of this article referred inaccurately to an official of the Whitney Museum. Adam Weinberg is the museum’s director; he is not its president.

Prévoyant, le gouvernement commande des grenades lacrymo pour 4 ans

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Le ministère de l’Intérieur a lancé le 8 août un appel d’offres pour une commande d’un montant de 22 millions d’euros (hors TVA) de « grenades de maintien de l’ordre et moyens de propulsions à retard »

Le gouvernement nommé par Emmanuel Macron se prépare-t-il à un quinquennat socialement agité ? En tout cas, il ne lésine pas – et n’a pas traîné – sur les moyens alloués au maintien de l’ordre. Le ministère de l’Intérieur a lancé le 8 août un appel d’offres pour une commande d’un montant de 22 millions d’euros (hors TVA) de « grenades de maintien de l’ordre et moyens de propulsions à retard » destinée à la police et à la gendarmerie nationales.

L’appel d’offres, publié dans le bulletin officiel des annonces des marchés publics (BOAMP), se divise en cinq lots contenant diverses références de grenades assourdissantes, lacrymogènes et fumigènes, de cartouches-grenades et de lanceurs. Lancé jusqu’à fin septembre, l’appel d’offres prévoit un contrat d’équipement pour… quatre ans. Emmanuel Macron sera donc paré jusqu’à la fin de son quinquennat.

Le timing de l’appel d’offres n’a pas manqué d’interpeller les esprits caustiques, qui relèvent que la rentrée de septembre pourrait s’avérer agitée pour le gouvernement. Alors que doit s’engager la réforme promise du code du travail, plusieurs manifestations sont déjà prévues par ses opposants. Et personne n’a oublié l’émergence du mouvement Nuit Debout contre la loi Travail précédente, ni le difficile printemps 2016 de manifestations contre le projet alors porté par Myriam El Khomri. 

Annonce d'appel d'offre publié par le BOAMP

« Celui qui déploie du CS est conscient qu’il peut tuer »

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Des disputes au sein du ministère de l’intérieur à propos du gaz de combat CS utilisé par la police : on en tire vers Brokdorf et Wackersdorf, des régions régies par la CDU-CSU, où des opposants au nucléaire ont subi une exposition à ce « super gaz lacrymogène » CS, et des médecins préviennent d’une méconnaissance de sa toxicité mettant la vie des manifestants en danger. 
Les manifestants ont subi des oedèmes du poumon, des chocs respiratoires et ont eu besoin de soins pour la peau. Les Länder dirigés par la SPD n’utilisent pas ce « gaz du diable », alors que le ministère de l’intérieur CSU/CDU prétend que le gaz n’est pas si dangereux et serait « médicalement inoffensif ».

Dans la ville de Linnich, les forces de l’ordre ont pu assister à une manifestation inhabituelle dans la cour de la police anti-émeute. Un homme seul s’est placé devant les canons à eau et a résisté jusqu’à ne plus pouvoir tenir debout avant que des médecins et des secouristes ne s’occupent de lui.
Cet homme, c’est Herbert Schnoor, 59 ans, ministre de l’intérieur du Land Nordrhein-Westfalen, et l’essai réalisé avec la force du canon à eau était en réalité un essai cobaye avec ce gaz controversé, le CS.
L‘expérience du ministre sous le jet de ce mélange de gaz CS et d’eau était, selon son porte-parole Reinhard Schimdt-Küntzel, « dégrisante et dévastatrice ». Après sa douche de gaz, Schnoor s’est senti comme « détruit » et « comme si une grosse bête venait de me vomir ». Pour les observateurs, il semblait « comme choqué, désorienté, étourdi et on ne pouvait pas lui parler pendant plusieurs minutes ».
Schnoor ne voulait même pas souhaiter à ses pires contradicteurs de se retrouver dans un tel état. « Tant que je serai ministre de l’intérieur », décida cet élu SPD après cette expérience de gazage lourde en conséquences, « la police de Nordrhein-Westfalen n’utilisera pas de gaz CS ».

Aujourd’hui, cinq ans après le test réalisé par le ministre, les habitants de Nordrhein-Westfalen comme le dit Schmidt-Küntzel, ne se sentent pas juste « confortés dans leur scepticisme ». Ils sont « vraiment soulagés » que dans leur région, malgré les ordres contradictoires, « on est restés clairement contre l’utilisation du CS ».
Car ce que Schnoor a expérimenté sur lui-même et que ses collègues des autres Länder régis par la CDU-CSU ne voulaient pas admettre, s’est avéré être une réalité dès la première utilisation du gaz CS contre les manifestants anti-nucléaire de Brokdorf et Wackersdorf. Ce gaz lacrymogène est le Chlorobenzylidenemalononitrile (CS – d’après le nom de leurs inventeurs Corson et Stoughton). 
Le bilan réalisé par des médecins a montré qu’il agit plus fortement et plus rapidement que le gaz lacrymogène habituel Chlorocétophénone (CN) et est d’après les médecins bien plus dangereux.
Le médecin Wolf-Dieter Grahn, de Schwandorf, qui a reçu plusieurs victimes du CS dans son cabinet, dit « ne plus être convaincu que ce gaz, comme tout le monde le prétend, serait si inoffensif que ça ». Le toxicologue Karl-Heinz Summer, travaillant à la société de recherche sur les ondes et l’environnement dans la ville de Neuherberg en bavière, en arrive à la conclusion que « chaque utilisation de CS », auquel les manifestants sont exposés et avec lesquels ils sont chassés, « est un danger d’un point de vue toxicologique ». Le chimiste Rainer Grießhammer de Freiburg, à l’institut de recherche sur l’environnement, tient les risques comme « incalculables » : celui qui déploie du CS contre des manifestants, que ce soit par canon à eau ou par grenade, agirait « volontairement avec négligence » affirme le scientifique, et « accepterait de prendre le risque de tuer des innocentes victimes ».
Même pour les experts du ministère de l’intérieur de Düsseldorf, « les soupçons qu’à l’échelle individuelle, il existe une bien plus grande sensibilité au gaz CS [que ce que l’on pensait jusque-là] ». Dans une analyse confidentielle qui a été récemment présentée au ministre, les fonctionnaires préviennent des effets très intenses (Schnoor) de hautes concentrations, « surtout quand on pense que les vêtements imbibés de CS sont encore portés pendant un moment après le gazage ». De plus, « lorsque la pression sanguine pré-existante était déjà assez élevée », dit la note, « il faut s’attendre à des complications ».
Le gaz controversé et ses conséquences sont en ce moment également un sujet pour la littérature médicale et scientifique. Dans une interview du « journal des médecins », le toxicologue spécialiste des poisons Max Daunderer parle de « 40 patients gravement atteints » dans son ambulance toxicologique après utilisation des gaz CS par la police, avec leur schéma clinique complet. Dans la revue spécialisée « Dermatoses », Thomas Fuchs et Hellmut Ippen, experts de la peau à l’université de Göttingen, sont très critiques vis-à-vis des gaz de combat CS et CN, « depuis des décennies, ces gaz sont utilisés comme arme de guerre militaire avec des conséquences graves sur la santé avec les personnes exposées, et que ces derniers sont maintenant utilisés comme moyen de combat par les forces de l’ordre ».
L’avertissement inhabituel d’autant de médecins et de scientifiques s’appuient sur des résultats médicaux après le gazage massif devant le grillage de l’usine de retraitement nucléaire (WAA) de Wackersdorf et au réacteur nucléaire de Brokdorf, qui a été mis en œuvre en Octobre dernier.
Des centaines de manifestants se sont présentés comme malades après le gazage massif des forces de l’ordre, et certains ont dû être hospitalisés. Les médecins traitants et les spécialistes de toutes parts ont été confrontés à des schémas cliniques jusque-là inimaginables.
Le médecin interne de Schwandorf Walter Angebrand a été « très étonné » de voir des brûlures au premier et au second degré chez ses patients, mais aussi des blessures aux yeux ou des oedèmes toxiques du poumon, « comme on n’a jusque là pu en voir uniquement «en intérieur dans des pièces fermées ou dans des accidents », confirme le toxicologue Daunderer.
Une habitante de Wackersdorf, de 23 ans, avait encore des séquelles 10 semaines après le gazage. Cette sportive de haut niveau, pratiquant le Karaté, s’était rendue avec plusieurs centaines de personnes devant le grillage du WAA. A peine arrivée, une grenade lacrymogène de la police a explosé tout près d’elle, et en quelques secondes dit-elle « j’étais tombée dans les pommes ». Comme elle n’arrivait plus à respirer, et que le médicament des médecins, un simple Spray, « n’avait pas vraiment d’effet », elle a été emmenée aux urgences à l’hôpital.
Par chance, l’urgentiste des soins intensifs a identifié un début d’œdème pulmonaire et un choc respiratoire, qui a causé une « sévère mise en danger de sa vie ». Ce n’est que par un enchaînement d’« heureux hasards » : la rapidité du traitement médical sur place et le transport rapide, que « la vie de la fille a pu être sauvée » renchérit le médecin.
La forme des blessures sous les gaz de Brokdorf et Wackersdorf était tout aussi compliquée et problématique. Des jours après leur retour à la maison, les médecins des manifestants ont encore pu observer des « douleurs à la poitrine » et des « difficultés respiratoires , qui étaient les plus intenses après 8 jours » comme il est indiqué dans un diagnostic dans la ville de Schwäbisch-Gmünd.

Après la publication en Juin, les manifestants de Brokdorf se sont plaints dans les cabinets de leurs médecins de « douleurs à la poitrine, d’irritations de la cornée et de fissures dans la peau, parfois avec des saignements, ou encore des douleurs dorsales ou des crampes d’estomac », qui leur semblait « gonflé comme un ballon ».
Les plus touchés étaient les habitants de Oberpfalz, qui ont protesté durant des mois contre la reconstruction de la centrale de Wackersdorf.
Le libraire de Schwandorf, Erwin Mayer, un homme de 100kg, ne cessait d’avoir des cloques sur les jambes pendant deux semaines, aussi grosses qu’une pièce de monnaie. Il lui a fallu un traitement intensif à la cortisone pour les faire cicatriser et reculer. Les médecins ont diagnostiqué une « dermatite toxique ». Cäcilia Hartl, 49 ans, femme au foyer à Burglengenfeld, a toujours été en excellente santé, faisant de l’escalade et gravissant des sommets de plus de 3000 mètres. Mais depuis sa participation à la manifestation anti-WAA, où elle a reçu une grenade lacrymogène à ses pieds. Elle « n’arrivait plus à respirer » et a eu un moment de panique dans lequel elle a pris la fuite. En rentrant chez elle, elle a remarqué « des cloques dans son nez » et elle avait « des douleurs dans la bouche ».
Une semaine plus tard, c’est devenu très grave. Elle se plaignait de « crises d’essoufflement sans raison, de pus, d’yeux grossis »… D’après le médecin, elle était pendant plusieurs jours « affaiblie du fait d’une intoxication, en incapacité de travailler ». Escalader ? « Rien », dit-elle, cela fait « des mois qu’elle ne peut plus grimper une montagne. »
Des cas comme Cäcilia Hartl, il y en a eu beaucoup en Oberpfalz, où les manifestations contre les centrales nucléaires ont eu lieu. C’est surtout là que les médecins ont pu faire « la nouvelle preuve », comme le toxicologue de Munich Daunderer le dit, que dans les cas de gazage au CS « en règle général il s’agit de symptômes de toxicité » et non pas d’allergies.
Daunderer, c’est l’auteur du seul manuel en Allemagne de l’Ouest pour la toxicologie clinique. Il a découvert dans son ambulance des « choses totalement inconnues dont on ne savait encore rien jusque-là ». Cet expert des poisons reconnu à l’échelle internationale, qui est aussi intervenu dans la catastrophe chimique de Bhopal en Inde a diagnostiqué chez les victimes du CS :
– Une tendance clairement plus élevée au saignement des gencives ou du nez
– Une élévation du taux de ferritine, comme chez les alcooliques (qui ont des dommages du foie aigus) 
– Un très lourd abcès au cou à côté des amygdales avec un coincement de la mâchoire très prononcé qui pourrait dans les cas les plus grave causer la mort sans opération
– Des marques rouges ressemblant à des piqûres de puces qui indiquent par leur effet qu’il s’agit de formes de brûlures.
Les pharmacologues de l’université Ludwig Maximilian de Munich ont, avec des analyses de laboratoire, confirmé les observations de Daunderer. L’effet du CS, comme le dit le professeur de toxicologie Werner Lenk, provoque dans le sang humain une « hémolyse », une forme de « remplacement du sang », dans lequel les « globules rouges vont éclater » et qui « réduisent le transport d’oxygène ».
Les découvertes médicales faites sur environ 200 patients du CS sont impressionnantes, comme le craignaient déjà les critiques du gaz, mais ce qui était contesté par les politiciens du CDU/CSU qui de leur côté se reposaient sur des scientifiques.
Les ministres de l’intérieur des Länder dirigés par la CDU/CSU ont ajouté ce « super gaz lacrymogène » à l’arsenal policier, comme s’en félicitait le gouvernement fédéral. Le bavarois Karl Hillermeier (CSU) et le ministre de l’intérieur de Kiel Karl Eduard Claussen (CDU) ont été les premiers à commander du CS. Les deux politiciens se sont appuyés sur la commission technique de la conférence des ministres de l’intérieur (IMK) qui a estimé que leur utilisation était « médicalement non dangereuse ». Même le tout récent « Lexique de la Police » de Reinhard Rupprecht, dirigeant ministériel dans le ministère de Bonn de Friedrich Zimmermann, ne voit « pas de raison d’arrêter » l’utilisation du gaz CS « qui ne devrait pas causer de dommages s’il est utilisé comme prescrit ».
Les référents de l’IMK prétendent toujours que les effets du CS ne sont que de l’inconfort, sans danger, comme « irritation du nez, de la muqueuse pharyngée, clignement et spasmes des paupières, larmes et écoulement nasal, salivation, brûlures de la peau, éternuements, nausées, sensation d’essoufflement et anxiété, rougeur de la peau. », des effets qui « s’estompent en 20 à 30 minutes ».
Les experts de la sécurité de l’IMK valorisent l’utilisation du CS plutôt que l’utilisation du CN qui était utilisé traditionnellement jusqu’ici : 
– le CS agit plus vite et plus fort sur les personnes non protégées que le CN à concentration identique
– le CS a un effet plus limité dans l’espace et dans le temps que le CN
– Manifestants et policiers qui sont éloignés du lieu de déploiement ne sont pas affectés
– Les personnes ayant subi des effets se rétablissent plus vite
Les risques pour la santé sont totalement ignorés par les spécialistes de l’IMK. « Médicalement, tout ceci est totalement impossible » dit le médecin spécialiste Angerbrand qui répète son ode au CS « je ne sais pas qui a observé ça ».
Après les événements de Wackersdorf et Brokdorf, la dispute politique autour du CS a rapidement pris un nouveau tour. Les oppositions ne pourraient être pires : l’ex ministre de l’intérieur bavarois Hillermeier, que ses opposants appellent « Killermeier », évalue le CS comme « étant inoffensif sur le long terme » alors que son collègue (SPD) du Saarland Friedel Läpple ordonnait plutôt que « l’extrême dangereuse diablerie qu’est le CS soit définitivement bannie de l’arsenal policier ». 
C’est ce qu’on fait en conséquence les gens de Breme. Ils n’utilisent pas de gaz CS et ne le stockent pas non plus. Si des policiers de Breme sont déployés dans d’autres Länder, ils n’ont toujours pas le droit d’utiliser du CS. C’est le seul Land qui a, dans le règlement de la police, banni totalement ce gaz.
Cette évaluation différente du CS met en danger le fonctionnement conjoint des polices des différents Länder qui s’entraident en cas d’urgence, pourtant bien rodée depuis des décennies. Les policiers de bavière et de badenwürttenberg ont soutenu leurs collègues de Hesse dans les altercations autour du train de Francfort sur les rails ouest. Et lors de la célèbre bataille de Brokdorf de 1981 mais aussi cet été, les fonctionnaires de plusieurs Länder se sont entraidés.
Cette coopération au-delà des frontières des Länder risque de bientôt se terminer, annonce Läpple du Saarland. En Hesse, où la SPD doit prendre garde à ses partenaires chez les verts, le travail collectif avec les policiers d’autres Länder a été remis en cause depuis longtemps. D’un autre côté, le président ministériel Franz Josef Strauß de bavière menace de ne plus envoyer aucun fonctionnaire bavarois en Hesse, si leur santé est « mise en jeu avec autant de légèreté » comme il l’a ressenti dans les émeutes anti-nucléaire début Novembre à Hanau.
Le ministre de l’intérieur du Saarland veut à nouveau mettre ce thème de discorde « à l’ordre du jour » de la prochaine conférence des ministres de l’intérieur. Comme les gens de Breme, Läpple ne veut pas admettre que les policiers de Saarland soient associés à des interventions en bavière, si l’« unité » des moyens des policiers « n’est plus assurée ». 
Les Länder avec des ministres CDU/CSU, qui utilisent du CS mélangé à l’eau dans les canons à eau, s’appuient sur « l’avis d’experts » de l’institut de Fraunhof de toxicologie. Les scientifiques estiment d’après certaines études internationales pour présenter le « gaz à vomi » (jargon des spécialistes) comme « un représentant optimal des composés agissant biologiquement comme irritants ». Le CS serait par rapport au CN un « gain en effets et en sécurité ». Son effet irritant le dépasserait « de beaucoup par son effet toxique général suite à un apport par les voies aériennes, de sorte qu’un effet nocif [d’une forte dose] n’est pas du tout possible sans contrainte ».
Cette expertise datant de 1979, mais restée confidentielle et qui n’est pas discutée publiquement, est « très discutable sur de nombreux aspects » (Daunderer). Les scientifiques utilisent la littérature disponible, mais ont renoncé à faire leurs propres essais. Les rapports, quant à eux, ont été « travaillés avec très peu de rigueur », comme le critiquait le spécialiste des gaz lacrymogènes récemment décédé Alfred Schrempf, il manquait surtout la prise en compte d’« une série d’études critiques envers le CS ». 
Le chimiste Grießhammer dit que cet avis comporte de nombreuses contradictions, ou des constatations « plus que douteuses ». Par exemple, l’étude de Fraunhof indique expressément que les effets irritants « apparaissent de façon extrêmement rapide et immédiate », déjà « en quelques secondes » apparaît chez les anti-nucléaires récalcitrants un « état d’incapacité à agir ». D’un autre côté, la même étude indique que les contestataires ont pu « par la fuite immédiate échapper aux gaz ».
Hors l’utilisation des gaz à Brokdorf et Wackersdorf a entraîné en réalité l’évanouissement d’un grand nombre de manifestant en quelques secondes, incapables de bouger. Georg Lotter, de Schwandorf dans l’Oberpfalz, a vu près du WAA comment mère et enfants sont tombés directement le visage sur le sol, et sont restés allongés par terre.
D’autres manifestants se sont mis à courir paniqués et désorientés à travers la forêt ou les cours d’eau, se sont perdus dans les sous-bois ou sont tombés dans des fossés ou des canaux d’égouts… Ce qui n’est pas surprenant pour les médecins. Car quand le CS se retrouve dans le corps humain, il se décompose en quelques minutes et produit du cyanure qui a un effet sur le système nerveux central et qui produit « une désorientation ». C’est un « effet secondaire connu », dit Daunderer, « que l’on glisse toujours sous le tapis ».
Il a aussi été impossible de prouver l’affirmation des chercheurs de Fraunhof, selon laquelle « un contact prolongé avec des habits exposés », comme il est indiqué dans l’expertise, « ne causerait pas d’irritation cutanée », et pour la formation de cloques, « il faudrait des conditions peu réalistes ». A Wackersdorf et à Brokdorf, les opposants au nucléaire ont fait l’expérience inverse.
Les scientifiques avaient averti les politiciens assez tôt des contradictions et des découvertes contraires. Le toxicologue de Kiel Otmar Wassermann a averti d’une « méconnaissance de la toxicité de ces substances mortellement dangereuse ». Dans une expertise pour le ministère de l’intérieur hollandais, des médecins et des pharmaciens se plaignent du « manque de données pour connaître » les potentiels dommages sur la santé à long terme, comme pour le cancer ou pour la reproduction. L’expertise prévient aussi du « danger pour la thyroïde, les reins, le foie et la rate » à de fortes doses de CS ou pour des contacts répétés.
Pour contrer ce type d’inquiétudes, les ministres de l’intérieur des différents Länder et du Bund ont ordonné la réalisation de leurs propres tests. Près de 200 personnes ont dû s’exposer aux gazages par canon à eau. Comme preuve pour la non dangerosité de ces gaz, cette expérience n’a cependant pas eu de succès. Seuls des jeunes policiers sportifs et en très bonne santé ont participé à l’expérience, en aucun cas comparables à la diversité de la population manifestante. L’apport en gaz a été fait « par de petites pluies modérées », ou par de « très brefs jets d’eau » comme l’indique le rapport de l’IMK.
Aucun rapport avec « le gazage direct pendant des durées plutôt longues » comme elles ont eu lieu dans les manifestations anti-nucléaires, où les opposants sont restés exposés pendant des heures sous la pluie de CS, « il n’est rien écrit pour de telles conditions » rappelle le médecin de Schwandorf Wolf-Dieter Grahn.
La proportion de gaz dans les canons à eau est très difficile à réguler, comme le disent les politiciens et les responsables de la police. Comme les cristaux de poudre de gaz CS sont quasiment insolubles dans l’eau, et on ne les mélange, associés à un solvant, qu’au dernier moment avant le jet d’eau. Il n’est pas garanti d’envoyer la même dose de gaz de façon constante dans ce cas.
L’effet toxique est d’ailleurs augmenté quand les molécules de CS restent sur les vêtements mouillés des manifestants pendant des heures, quand elles s’accrochent dans le feuillage du sous-bois, ou quand elles sont renvoyées sur les manifestants une seconde fois à cause des pales des hélicoptères volant à basse altitude. Le médecin munichois Daunderer reproche à la police sa « négligence », car les conditions réelles « ne correspondent pas du tout à celles des tests ».
Le « plus criminel dans toute cette histoire », selon Daunderer, serait cependant l’usage alternatif de CN et de CS comme à Wackersdorf, car on ne sait pas du tout l’effet combiné de ces deux gaz. Aucune souris sur Terre n’a jamais subi « d’abord un gazage CN puis un gazage CS ». C’est comme si la police bavaroise avait « ajouté un second dommage sur un premier préexistant ». 
CS est appelé ainsi d’après le nom de Corson et Stoughton qui l’ont découvert. 
Wackersdorf, 1986.

Pourquoi des médecins ont-il prélevé le sang de «gilets jaunes»?

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DÉCRYPTAGE – Une enquête a été ouverte par le parquet de Paris pour «violences volontaires aggravées» et «mise en danger de la vie d’autrui».

Une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Paris pour «violences volontaires aggravées» et «mise en danger de la vie d’autrui», après des prélèvements sanguins effectués dans la rue sur des manifestants pendant des rassemblements de «gilets jaunes».

» LIRE AUSSI – Apolitiques ou anarchistes, les «street medics» portent secours aux «gilets jaunes»

Les 20 avril et 1er mai, lors des manifestations, des personnes ont été filmées en train d’effectuer des prises de sang sur des manifestants sur le trottoir à quelques mètres du rassemblement. Ils se présentaient comme des «street medics», ces volontaires apolitiques ou anarchistes qui proposent leur aide lors de manifestations publiques. Il s’agissait en réalité de trois médecins: Josiane Clépier, généraliste, un anesthésiste Belge, Renaud Fiévet, et une ophtalmologue, Christiane Blondin. Ils étaient accompagnés d’un ancien biologiste aujourd’hui professeur de maths, Alexander Samuel, et de deux infirmières. Ces dernières auraient pratiqué les prises de sang, supervisées par les médecins. Le but de l’équipe: lancer une alerte prouvant que les gaz lacrymogènes CS utilisés par les forces de l’ordre contiennent du cyanure à haute dose, dangereux pour la santé.

Sur une première vidéo, une personne assise par terre, subit une prise de sang dans le brouhaha. La séquence aurait été filmée par un «street medic» qui l’aurait fait circuler.Sur la seconde vidéo, on entend les personnes casquées relever les coordonnées du manifestant et lui assurer: «On va t’envoyer les analyses chez toi». Ces prises de sang semblent avoir été pratiquées avec le consentement écrit des personnes puisque l’on entend notamment: «Il faut lui faire signer le consentement». Cette scène aurait été filmée par l’équipe d’Alexander Samuel, «pour l’envoyer à SOS ONU et leur montrer que l’opération est encadrée».

Des prélèvements légaux?

Au Figaro, François Braun, président de Samu secours de France, confirme qu’il est très fréquent de procéder à des prises de sang à l’extérieur. «Lorsqu’il y a un accident de la route, on fait systématiquement une prise de sang. Le lieu n’est donc pas le problème.» En revanche, «il est impératif de respecter les conditions d’hygiène qui sont les mêmes qu’à l’hôpitaldésinfection des mains, gants, asepsie de la peau, matériel stérile. Garder les analyses au froid si besoin.» Or, les vidéos ne permettent pas de vérifier que cette procédure sanitaire a été respectée. «On voit qu’ils ne portent pas de gants pour manipuler les produits biologiques. On ne voit pas tout le geste ni la mise en place de l’aiguille dans la peau», déplore François Braun.

Après les vidéos des prélèvements, un troisième film, également tourné par les médecins, montre Alexander Samuel en train de procéder à un test instantané, à même le sol.

La façon de faire étonne le médecin urgentiste. «On ne comprend pas bien ce qui se passe. La personne touche le sol avec ses gants avant de retoucher les produits. À l’hôpital, lorsqu’on doit diluer le sang pour faire un test, on utilise de l’eau stérile. Là, la personne plonge plusieurs fois une seringue dont on ne sait si elle est stérilisée dans une bouteille de coca remplie d’eau», analyse, dubitatif, François Braun. Cela pousse le médecin urgentiste à s’interroger sur une contamination extérieure des prélèvements.

De son côté, Alexander Samuel assure qu’il n’est pas nécessaire d’avoir de l’eau stérile pour cette analyse. Le test utilisé est un Cyanokit, un test instantané créé par la société suisse CyanoGuard. Celui-ci n’est pas utilisé en France. Conçu notamment pour vérifier le taux de cyranure dans les productions comme le magnoc, le Cyanokit est utilié dans les pays en développement. Contacté par Le Figaro, le fabricant assure que le test est utilisé «par des médecins légistes en Europe et à l’étranger».

L’hypothèse est que le gaz CS, présent dans les lacrymogènes utilisées par les forces de l’ordre, se transforme d’abord en cyanure puis en thiocyanate, un dérivé du cyanure présent notamment dans les cigarettes, une fois dans l’organisme. «La durée de vie du cyanure est de moins d’une heure alors que les thiocyanates restent dans les urines et le sang pendant plusieurs jours. C’est pour cela que nous avions besoin d’un test immédiat», explique Alexander Samuel. Dans une vidéo publiée sur YouTube, il explique la manière dont le Cyanokit doit être utilisé.

Bien que surprenante, cette pratique serait légale si «la personne consent à un prélèvement biologique pour des motifs qu’elle connaît et que ce prélèvement est effectué par un professionnel qualifié pour le faire», d’après le Conseil national de l’Ordre des médecins. «La seule réserve serait que le traitement de l’échantillon soit également effectué par un professionnel qualifié et identifié, afin que le résultat rendu soit techniquement fiable.»

La pratique rejetée par les «street medics»

Dès publication des vidéos, le groupe de «street medics» Coordination 1ers secours, soutenu par SOS ONU, a rédigé un communiqué pour dénoncer ces pratiques. «Nous conseillons vivement aux victimes de ne pas accepter de se faire prélever dans de telles conditions (…) la technique n’est pas viable.»

Dans les commentaires, Claire a déclaré avoir été prélevée. Au Parisien , elle explique avoir fait un malaise après qu’une grenade a explosé à ses piedsSes amis ont alors crié «street medics» lorsqu’elle s’est mise à suffoquer. Après avoir été soignée par deux hommes et une femme, elle aurait signé, «encore stone», le consentement écrit. D’après ses amis ils avaient des gants et la pochette et l’aiguille avaient l’air stériles. «Mais autour de nous, ça gazait encore.»

De son côté, Maxime Nicolle, alias Fly Rider, a déclaré dans un live Facebook avoir eu recours au prélèvement «une heure après exposition aux gaz». Il assure que les conditions d’hygiènes étaient respectées. Le fabricant du test a confirmé à Libérationque le résultat était bien positif au cyanure.

Les gaz lacrymogènes contiennent-ils du cyanure?

Joint par le Figaro, Alexander Samuel, qui ne faisait pas partie du mouvement «gilet jaune», explique qu’il a effectué ces recherches à la demande de SOS ONU. «J’étais présent lors de l’affaire Geneviève Legay. Ils voulaient mon témoignage. Lorsque je leur ai dit que j’étais un ancien biologiste, ils m’ont envoyé un résultat d’analyse qui montrait un niveau élevé de thiocyanates.» Le professeur de maths pense d’abord à une information mensongère. «Je ne voyais pas le rapport entre le cyanure et les gaz lacrymogènes et il ne s’agissait que d’un seul cas.»

Mais de leur côté, les membres du collectif de SOS ONU contactés par nos soins démentent ardemment ces allégations. «Nous ne l’avons jamais contacté.» SOS ONU a aussi cherché à savoir si des intoxications au cyanure à cause des gaz lacrymogène étaient possibles. Au cours du mois d’avril, le collectif a publié sur sa page Facebook plusieurs résultats d’analyses provenant notamment du laboratoire de biologie médicale du CHU de Lyon. Si certains résultats semblent dans la norme, d’autres indiquent que les mg par litre de sang sont plus élevés que les doses normales d’un patient fumeur. Sur chaque publication, un message: «vous présentez des symptômes, demandez le dosage du thiocyanate sanguin et urinaire. Faites les parvenir» à SOS ONU. «Nous cherchions à récupérer des témoignages pour Me Arié Alimi qui souhaitait lancer une procédure judiciaire légale, expliquent-ils. Il a montré les dossiers que nous avons reçus à un spécialiste et les résultats ne semblent pas avoir de rapport avec le cyanure donc nous nous sommes arrêtés là.»

Contacté par CheckNews, François Parant, du laboratoire du CHU de Lyon, a confirmé la véracité des résultats en précisant toutefois qu’ils ne permettaient pas de prouver une intoxication au cyanure. La «technique colorimétrique», également utilisée lors d’une exposition au cyanure pendant un incendie, «manque de spécificité».

Le groupe des médecins et infirmières estime donc que lorsque le gaz CS est absorbé, l’une des molécules (la malonitrile) se transforme en cyanure dans l’organisme puis en thiocyanates. Mais d’après le protocole cité par l’agence française de sécurité sanitaire des produits de santé, le taux de thiocyanates ne permet pas de confirmer une intoxication. Pour caractériser des symptômes en intoxication au cyanure, il faut s’intéresser aux lactates. «Une hypotension et/ou une concentration plasmatique en lactate supérieure à 10 mmol/l suggèrent fortement une intoxication au cyanure», est-il écrit dans le rapport.

Une personne intoxiquée au cyanure devrait alors ressentir des «nausées, vomissements, maux de tête, altération de l’état neurologique (par exemple confusion, désorientation), sensation d’oppression thoracique, manque d’air, hypertension ou hypotension, collapsus cardiovasculaire, convulsions ou coma etc.» Les «street medics» de plusieurs groupes ont en effet déjà récolté des témoignages faisant état de symptômes similaires. Si les risques d’intoxication au cyanure semblent faibles, le docteur Jean-Marc Sapori s’inquiète cependant des effets irritants des gaz lacrymogènes. «En étant exposé chaque semaine au gaz lacrymogène, les bronches sont atteintes et il est possible de développer des pathologies chroniques.»

Quelle suite pour les résultats?

Si les résultats des Cyanokit, immédiats, ont été délivrés aux patients, ceux des thiocyanates de ces mêmes personnes ne sont pas connus pour l’instant. Certains «gilets jaunes» piqués ont rapporté n’avoir toujours pas reçu les conclusions de leurs analyses. Celles-ci auraient été envoyées dans un laboratoire à Bruxelles. On évoque également des laboratoires étrangers. Alexander Samuel, lui, indique ne pas avoir la main sur les résultats des analyses: «les médecins les récupèrent, les montrent aux patients mais je n’y ai pas accès si le patient ne veut pas que je les voie».

Des résultats dont doutent fortement Jean-Marc Sapori et François Braun. «Le kit donne une couleur mais aucune valeur chiffrée. Cela ressemble plutôt à ce que pourraient utiliser les pompiers sur un incendie mais j’ai beaucoup de mal à comprendre l’intérêt médical de ce kit», estime le président de Samu urgence de France. Même sentiment pour Jean-Marc Sapori, «réservé sur les interprétations des résultats.» D’autant plus qu’aucune analyse n’a été produite avant l’exposition au gaz lacrymogène pour établir une comparaison avant après.

À ce jour, plus d’une dizaine de prélèvements ont été faits. De son côté, Alexander Samuel continue de s’appuyer sur des études, majoritairement étrangères, et espère récolter suffisamment de résultats d’analyses pour pouvoir lancer une alerte. En attendant, il n’a pas prévu de retourner en manifestation pour procéder aux prises de sang.

Déchainement médiatique autour des prises de sang, merci au sérieux de l’AFP…

https://www.liberation.fr/checknews/2019/05/11/effets-persistants-rumeurs-de-cyanure-les-gaz-lacrymo-utilises-contre-les-manifestants-inquietent_1720285

https://www.google.com/amp/s/fr.news.yahoo.com/amphtml/gilets-jaunes-pr%25C3%25A9tendus-street-medics-053028994.html

https://www.guadeloupe.fr/actualites-internationale/gilets-jaunes-ces-faux-street-medics-qui-ont-preleve-le-sang-des-manifestants/

https://www.lesinrocks.com/2019/05/16/actualite/actualite/prelevements-sanguins-en-pleine-manifestation-les-pratiques-douteuses-de-pretendus-street-medics/

https://mobile.agoravox.tv/tribune-libre/article/gilets-jaunes-des-prelevements-81600

https://lavdn.lavoixdunord.fr/582310/article/2019-05-13/les-gaz-lacrymogenes-peuvent-ils-causer-des-intoxications-au-cyanure

https://www.lepoint.fr/societe/gilets-jaunes-du-sang-preleve-sur-des-manifestants-11-05-2019-2311976_23.php

https://www.20minutes.fr/societe/2495507-20190412-gilets-jaunes-intoxiques-cyanure-gaz-lacrymogenes-police

https://www.lci.fr/population/gaz-lacrymogenes-l-effet-irritant-bien-plus-dangereux-que-de-potentiels-traces-de-cyanure-2118099.html

https://www.lci.fr/population/fact-check-gilets-jaunes-des-manifestants-ont-ils-pu-etre-intoxiques-au-cyanure-2117244.html

https://www.lci.fr/population/des-gaz-lacrymogenes-composes-de-cyanure-2120862.html

https://francais.rt.com/france/62127-gilets-jaunes-faux-street-medics-preleve-sang-manifestants

https://www.midilibre.fr/2019/05/16/gilets-jaunes-dintrigants-prelevements-sanguins-sur-les-manifestants,8203038.php

https://www.nouvelobs.com/societe/20190516.OBS13019/les-street-medics-alertent-sur-les-prelevements-sanguins-sauvages-dans-les-manif-de-gilets-jaunes.html

https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/gilets-jaunes/gilets-jaunes-comment-de-pretendus-street-medics-ont-effectue-des-prelevements-sanguins-en-pleine-manifestation_3432957.html

http://m.leparisien.fr/faits-divers/mais-qui-preleve-le-sang-des-gilets-jaunes-a-meme-le-trottoir-lors-des-manifs-11-05-2019-8069772.php

https://www.europe1.fr/societe/enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-lors-de-manifestations-des-gilets-jaunes-3899754

https://www.lemonde.fr/societe/article/2019/05/24/ouverture-d-une-enquete-preliminaire-apres-des-prises-de-sang-realisees-dans-les-manifestations-des-gilets-jaunes_5466365_3224.html

https://www.sciencesetavenir.fr/sante/rumeurs-cyanure-et-lacrymo-des-prises-de-sang-sauvages-pendant-les-manifs-de-gilets-jaunes_133933

https://www.la-croix.com/France/Rumeurs-cyanure-lacrymo-prises-sang-sauvages-manifs-gilets-jaunes-2019-05-24-1301024147

https://www.lexpress.fr/actualites/1/societe/rumeurs-cyanure-et-lacrymo-des-prises-de-sang-sauvages-pendant-les-manifs-de-gilets-jaunes_2080013.html

https://www.lepoint.fr/societe/rumeurs-cyanure-et-lacrymo-des-prises-de-sang-sauvages-pendant-les-manifs-de-gilets-jaunes-24-05-2019-2314797_23.php

https://www.sudouest.fr/2019/05/24/rumeurs-cyanure-et-lacrymo-des-prises-de-sang-sauvages-pendant-les-manifs-de-gilets-jaunes-6119575-10530.php

http://www.lefigaro.fr/actualite-france/enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-sur-des-gilets-jaunes-20190521?fbclid=IwAR0Dk9OhwmSgkVUylQzgzt9Qtj2E4a45nmJOSMMAmZa3kzTJFwWnDvUu3X8

https://www.liberation.fr/direct/element/enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-lors-de-manifestations-des-gilets-jaunes_97868/

https://izlandbipbip.com/news/france/gilets-jaunes-du-sang-preleve-sur-des-manifestants/

https://www.newsstandhub.com/fr-fr/le-figaro/enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-sur-des-gilets-jaunes

https://www.ladepeche.fr/2019/05/21/gilets-jaunes-pourquoi-de-faux-street-medics-ont-effectue-des-prelevements-sanguins,8212375.php?mediego_euid=%7BIDDI%7D

https://www.cnews.fr/france/2019-05-21/gilets-jaunes-une-enquete-ouverte-sur-des-prelevements-sanguins-sauvages-lors-des

https://www.ouest-france.fr/societe/gilets-jaunes/pourquoi-des-gilets-jaunes-ont-ils-subi-des-prelevements-sanguins-pendant-les-manifestations-6361090

https://www.linfo.re/france/societe/prelevements-sanguins-de-gilets-jaunes-enquete-ouverte-par-le-parquet

https://www.msn.com/fr-fr/actualite/france/pr%C3%A9l%C3%A8vements-sanguins-de-gilets-jaunes-le-parquet-ouvre-une-enqu%C3%AAte/ar-AABDSa3

https://www.gj-magazine.com/gj/prelevements-sanguins-dans-les-manifs-gj-une-enquete-ouverte/

https://news.sfr.fr/actualites/societe/gilets-jaunes-enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-lors-de-manifestations.html

https://sfrpresse.sfr.fr/article/a0f77c88-ffb8-46c8-b501-d0a0add8a1b9

https://www.lesinrocks.com/2019/05/21/actualite/actualite/ouverture-dune-enquete-pour-des-prelevements-sanguins-en-manif-des-gilets-jaunes/

https://www.huffingtonpost.fr/entry/gilets-jaunes-enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-en-manifestation_fr_5ce38bdce4b075a35a2c346b

https://www.valeursactuelles.com/societe/gilets-jaunes-enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-107193

https://www.francetvinfo.fr/economie/transports/gilets-jaunes/une-enquete-preliminaire-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-lors-de-manifestations-des-gilets-jaunes_3452405.html

https://fr.news.yahoo.com/gilets-jaunes-enqu%C3%AAte-ouverte-apr%C3%A8s-185656692.html

https://www.cnews.fr/france/2019-05-20/gilets-jaunes-en-direct-enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-lors-de

https://www.20minutes.fr/justice/2522431-20190520-gilets-jaunes-enquete-ouverte-apres-prelevements-sanguins-realises-lors-manifestations

https://www.lexpress.fr/actualite/societe/justice/prelevements-sanguins-de-gilets-jaunes-le-parquet-ouvre-une-enquete_2079269.html

http://www.leparisien.fr/faits-divers/prelevements-sanguins-des-gilets-jaunes-la-justice-ouvre-une-enquete-20-05-2019-8076252.php

https://www.europe1.fr/societe/enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-lors-de-manifestations-des-gilets-jaunes-3899754?fbclid=IwAR2e8_ryji77kAZeFCAJufnxeGzhoyugrl0YmWXWVjBUIFtvpweFp-L5uwU

https://france3-regions.francetvinfo.fr/paris-ile-de-france/paris/gilets-jaunes-gaz-lacrymogenes-sont-ils-dangereux-sante-1664551.html

https://www.actualites-du-jour.eu/article/enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-lors-de-manifestations-des-gilets-jaunes/4259128

https://mouscron.nordeclair.be/391158/article/2019-05-20/gilets-jaunes-enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins

https://www.lepoint.fr/societe/rumeurs-cyanure-et-lacrymo-des-prises-de-sang-sauvages-pendant-les-manifs-de-gilets-jaunes-24-05-2019-2314797_23.php

http://www.jeuxvideo.com/forums/42-69-59772615-1-0-1-0-enquete-ouverte-apres-des-prelevements-sanguins-lors-de-manifestations-des-gilets-jaunes.htm

Effets persistants, rumeurs de cyanure : les gaz lacrymo utilisés contre les manifestants inquiètent

Par Olivier Monod 11 mai 2019 à 09:47

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Utilisation du gaz lacrymogène lors de la manifestation des gilets jaunes à Toulouse, le 30 mars 2019.
Utilisation du gaz lacrymogène lors de la manifestation des gilets jaunes à Toulouse, le 30 mars 2019. Photo Ulrich Lebeuf. Myop pour Libération 

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Des gilets jaunes affichent des symptômes persistants après une exposition aux gaz. Certains évoquent une intoxication au cyanure, sans qu’aucune n’ait été caractérisée. Des voix scientifiques s’élèvent pour mener des recherches sérieuses sur les effets des gaz.

Question posée par Gérard Portier le 09/04/2019

Bonjour,

Des prises de sang réalisées en pleine manifestation. La scène surprenante a été vue lors des manifestations du 20 avril et du premier mai, et dénoncée dans un communiqué par La coordination Premiers Secours. «Nous tenons à faire savoir qu’aucun Médic de la coordination n’est acteur de ces gestes irresponsables. Nous dénonçons ses pratiques, et rappelons que ces initiatives engagent leur responsabilité individuelle

Des vidéos datées du 20 avril et tournées à Paris, que CheckNews a pu consulter, montrent des prises de sang et des analyses de sang réalisées sur le trottoir, et parfois sans gants. Cette pratique contestée a pour objectif d’étayer les soupçons qui montent depuis plusieurs semaines sur la composition des gaz lacrymogènes, alors que de plus en plus de témoignages de manifestants font état d’effets persistants. Certains dénonçant depuis plusieurs mois des cas d’intoxication au cyanure.

À la recherche du cyanure

Le 10 février dernier, l’avocate Raquel Garrido met le sujet du cyanure sur la table en partageant ses symptômes post-manifestation (douleurs, vomissement, migraine) sur les réseaux sociaux. «Selon mon médecin, cela ressemble un empoisonnement à l’acide cyanhydrique», affirme-t-elle.

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Raquel Garrido@RaquelGarridoFr

J’ai informé mes amis (FB) de mes symptômes consécutifs à l’absorption de gaz hier à l’ActeXIII. Depuis, je reçois quantité de témoignages similaires. Selon mon médecin, cela ressemble un empoisonnement à l’acide cyanhydrique. Je demande à @Place_Beauvau la composition du gaz.2 79514:42 – 10 févr. 20193 531 personnes parlent à ce sujetInformations sur les Publicités Twitter et confidentialité

Les symptômes décrits par Raquel Garrido restent proches de ceux provoqués par une exposition au 2-Chlorobenzylidènemalononitrile, le gaz utilisé dans les lacrymogènes (aussi appelé gaz CS), selon la fiche toxicologique de l’INRS. Le témoignage de l’avocate est dénoncé, et parfois moqué, dans des médias et un syndicat de police.

Début avril, le collectif SOS ONU, qui s’est donné pour mission de recueillir des témoignages de violence policière afin de compléter le dossier déjà déposé au Haut-Commissariat des Droits de l’Homme, ajoute sa pierre à la polémique en publiant sur sa page Facebook des résultats d’analyses sanguines et urinaires de manifestants. Certains montrent des taux de thiocyanates dans les urines ou dans le sang supérieurs aux valeurs de référence. Parmi les deux tests publiés, l’un affiche 15,9 mg/L de thiocyanate dans le sang (contre 7,5 mg/L de référence chez les fumeurs) et l’autre affiche 31,4 mg/L dans les urines (contre 25 mg/L de référence chez les fumeurs).

Or le thiocyanate est produit par le corps humain en cas d’exposition au cyanure. Ce qui a conduit SOS ONU à écrire «Analyses CYANURE POSITIF !!» et à lancer une campagne pour demander aux personnes présentant des symptômes persistants après une exposition aux gaz lacrymogènes de réaliser le test au thiocyanate dans le sang, dans l’espoir de démontrer une intoxication au cyanure due aux gaz lacrymogènes.

Que disent les tests ?

CheckNews a contacté le docteur François Parant, médecin au laboratoire qui a effectué les analyses publiées par SOS ONU. Il confirme que son laboratoire a reçu bien plus de demandes de dosages de thiocyanates que d’habitude depuis décembre 2018. La véracité des documents publiés n’est pas remise en cause, mais les concentrations retrouvées, bien que parfois supérieures aux valeurs de référence du laboratoire, ne permettent pas, selon lui, de caractériser une intoxication au cyanure.

«Dans notre laboratoire, nous réalisons les dosages des thiocyanates sériques [dans le sang, ndlr] et urinaires par technique colorimétrique. L’indication usuelle est la documentation d’une exposition aux cyanures suite à un incendie. La méthode utilisée manque néanmoins de spécificité ; les résultats doivent être interprétés au regard d’analyses biochimiques complémentaires et de la clinique», explique François Parant.

Au centre anti-poison de Lyon, le docteur Jean-Marc Sapori confirme également avoir été sollicité par des personnes exposées au gaz lacrymogène et pensant être intoxiquées par du cyanure. «Jusqu’à présent, tous les cas rapportés à notre centre présentent logiquement des signes irritatifs classiques, parfois associés à d’autres signes, très divers, mais ne pouvant être imputés à une intoxication manifeste au cyanure», explique-t-il à CheckNews.

Lire aussi : UN VÉHICULE BLINDÉ A-T-IL DIFFUSÉ POUR LA PREMIÈRE FOIS DE LA POUDRE LACRYMOGÈNE SUR LES GILETS JAUNES, SAMEDI 16 MARS ?

Les tests complémentaires

Pour caractériser la présence de cyanure dans le sang des manifestants, certains membres de SOS ONU ont voulu aller plus loin que les tests en laboratoire, proposant donc de réaliser des analyses sanguines pendant les manifestations. Une vidéo a été postée sur YouTube pour expliquer la démarche.

La pratique de ces tests a généré de vifs désaccords au sein du collectif et, aujourd’hui, la page Facebook SOS ONU dénonce cette pratique aux côtés des street medics.

CheckNews a contacté le médecin belge Renaud Fiévet qui supervise les prises de sang en question sur le terrain. «Les prises de sang sont effectuées dans le respect des protocoles de la haute autorité de santé, par des infirmières diplômées», affirme-t-il.

Les tests en question sont fournis par la société suisse CyanoGuard et commercialisés depuis 2018. «Après avoir échangé avec le fabricant, nous avons décidé de doubler quantité de sang testé afin d’abaisser le seuil de détection», confie Renaud Fiévet.

Le célèbre gilet jaune Maxime Nicolle s’est livré au test, et en a publié le résultat le 1er mai «une heure après exposition aux gaz». Il assure à CheckNews, et dans un live, que le test s’est déroulé dans de bonnes conditions d’hygiènes. CheckNews a envoyé par mail la photo du test de Maxime Nicolle au fabricant du kit, qui confirme un résultat positif au cyanure.

Test de cyanure sanguin publié par Maxime Nicolle

Ce résultat permet-il de conclure quoi que ce soit? Notons que ce test n’a pas été effectué avant la manifestation pour comparer un résultat avant et après exposition. Par ailleurs, Jérôme Langrand, médecin toxicologue au Centre Antipoison de Paris, est dubitatif sur le test en question. «Il existe des dosages fiables, réalisés par des laboratoires reconnus, pour doser le cyanure dans le sang. Pourquoi faire appel à des bandelettes moins validées scientifiquement ?» Dans le protocole pour établir une intoxication au cyanure, les médecins demandent aussi le dosage des lactates sanguins, qui prouvent que le cyanure a bien eu une action biologique. Car une exposition au cyanure n’est pas en soit synonyme d’une intoxication, on retrouve des doses de cyanure ou thiocyanate dans le sang de la population générale.

Les gaz lacrymogènes contiennent-ils du cyanure ? L’hypothèse du métabolisme

Par aileurs, à ce stade, si on connaît l’exposition au cyanure par la cigarette, l’alimentation, ou encore les incendies, rien ne vient valider l’hypothèse de la présence de cyanure dans le gaz lacrymogène.

Lire aussi : GARE À L’ORTHOCHLOROBENZYLIDÉNÉMALONONITRILE

Sollicitée par CheckNews, la direction générale de la police nationale affirme qu’«aucune trace de cyanure d’hydrogène n’a été détectée lors des tests effectués sur les engins utilisés par la police comme la gendarmerie». Une réponse qu’elle avait déjà faite à France Info ou LCI.

L’hypothèse du métabolisme

L’hypothèse la plus répandue est la modification du gaz CS dans le corps humain. L’idée est que le CS serait en partie transformé par le métabolisme en cyanure d’hydrogène puis en thiocyanate. Le schéma explicatif ci-dessous avait été publié par SOS ONU en avril.

Ce mécanisme ne sort pas de nulle part. La transformation du gaz CS en cyanure est même démontrée chez les animaux en cas de forte exposition au CS. La réalité de ce phénomène chez l’homme a donc été étudiée. Après évaluation, son rôle dans la toxicité du gaz CS a été écarté.

En 2001, une revue de littérature (résumé du savoir existant sur un domaine) intitulée «Agents de contrôle des émeutes : pharmacologie, biochimie et chimie», s’est penchée sur la formation de cyanure à partir de CS chez l’homme :

«La formation de cyanure d’hydrogène à partir de CS a été le sujet de plusieurs études chez l’animal et chez l’humain. […] Des études visant à déterminer la quantité de cyanure produite, mesurée par le taux de thiocyanate dans le sang, chez des humains exposés au CS ont été conduites. Les résultats de ces études trouvent des niveaux de thiocyanate plasmiques négligeables». En clair, la métabolisation du CS peut créer du cyanure mais en très petite quantité.

En 2013, le scientifique néo-zélandais Léo Schep publie un article sur le mécanisme d’action des gaz lacrymogènes. Il y écrit que «des niveaux minimums de cyanure et thiocyanate peuvent apparaître dans les urines après une exposition orale ou par intraveineuse au CS». Il ajoute que «dans des circonstances normales, on ne pense pas que suffisamment de cyanure soit libéré pour causer des effets systémiques».

CheckNews l’a contacté pour mettre à jour et préciser son propos : «Le cyanure ne contribue pas à la toxicité du CS, il s’agit d’un sous-produit très mineur issu du métabolisme du CS par le corps».

Enfin, un article plus récent (2016) sur le mécanisme d’action des gaz lacrymogènes ne parle pas du tout d’effet lié au cyanure. Son auteur, Sven-Eric Jordt, affirme à CheckNews qu’«il n’y a pas de preuve d’une intoxication au cyanure due aux gaz lacrymogènes».

Notons enfin que la question du cyanure n’est évoquée ni par le site Désarmons-les, un collectif «contre les violences d’État» dans son article de 2018 (Ce qu’il faut savoir sur les lacrymo) ni par la Coordination des premiers secours (qui regroupe les street medics) dans son article de 2019 Le gaz lacrymogène, ses effets et comment s’en protéger.

Des victimes dues à une surexposition ?

La dangerosité des gaz lacrymogènes est avérée sans aller chercher une intervention du cyanure. Les effets du CS vont du picotement dans les yeux et la gorge à faible concentration et en cas d’exposition courte au risque mortel (très rare) en cas de forte concentration dans un milieu confiné sans possibilité de fuite. Les victimes auxquelles CheckNews a pu parler dans le cadre de cette enquête évoquent des symptômes qui persistent plusieurs semaines. Elles ont été exposées toutes les semaines aux gaz et parfois pendant plusieurs minutes sans pouvoir sortir du nuage. Des conditions qui s’éloignent des circonstances habituelles.

Mediapart a récolté plusieurs témoignages faisant état «de problèmes de santé liés à l’utilisation massive et répétée du gaz lacrymogène». En effet, le nombre de munitions tirées et la récurrence des mouvements toutes les semaines amènent les manifestants dans des niveaux d’expositions élevés et aux conséquences peu documentées.

«D’éventuelles conséquences à long terme des expositions au gaz lacrymogènes peuvent être envisagées, en particulier au niveau respiratoire (broncho-pneumopathies chroniques obstructives…) dans le cas d’expositions importantes et répétées, mais elles sont relativement peu documentées dans la littérature (souvent lors d’expositions professionnelles d’ailleurs)», explique Jean-Marc Sapori.

Dans son guide toxicologique publié en 2003, l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ), note que «La toux et la dégradation de la fonction respiratoire engendrées par une exposition au CS peuvent se prolonger pendant plusieurs mois. […] Toutefois, ces effets s’observent généralement lorsque les individus ont été exposés au CS de manière prolongée dans un espace confiné ou lorsqu’ils souffrent d’une maladie pulmonaire préexistante» (en page 176).

Lire aussi : LA CONVENTION SUR L’INTERDICTION DES ARMES CHIMIQUES INTERDIT-ELLE LE GAZ LACRYMOGÈNE?

Une enquête de suivi nécessaire

Trois articles scientifiques de 20172014 et 2015 soulignent les potentiels effets «sérieux» du gaz CS sur la santé humaine (sans parler de cyanure) et le manque de données de qualité sur le sujet. Les chercheurs pointent du doigt les limites des données existantes sur les effets des gaz lacrymogènes et appellent à plus de recherches sur le sujet.

Interrogé par CheckNews, Sven-Eric Jordt, chercheur à la Duke University School of Medicine, regrette «l’écart entre la hausse de l’utilisation des gaz lacrymogènes par les gouvernements et la faiblesse des recherches sur leurs effets». Il aimerait voir menées «des études de suivi».

Jean-Marc Sapori plaide aussi pour un suivi du sujet, eu égard au caractère inédit du mouvement des gilets jaunes : «Nous sommes face à un cas atypique d’exposition répétée sur de nombreuses semaines aux gaz lacrymogènes qui mériterait une enquête épidémiologique sérieuse afin de mieux décrire les conséquences sanitaires de cette exposition chronique».

Une situation exceptionnelle décrite par la coordination premier secours qui parle de manifestants se trouvant «soudain noyés dans le gaz lacrymo, avec plus d’une cinquantaine de palets fumant en même temps». Des conditions aggravéespar les «techniques dites «de nasse» où les manifestants (et de malheureux passants) se trouvent pris au piège, sans aucune échappatoire, dans un air irrespirable». Dans de telles situations, les victimes de ces gaz «sont pliées en deux, cherchant de l’air contre les murs des bâtiments, voire prostrées au sol, apeurées, aveuglées, incapables de reprendre leur respiration».

Si vous souhaitez signaler des cas de séquelles durables en raison de l’exposition aux gaz lacrymogènes, la rédaction de Checknews est joignable par mail sur checknews@libe.fr ou sur twitter: @CheckNewsfr.

Cordialement

DANGERS POUR LA SANTÉ: LA PNH DEVRAIT-ELLE BANNIR LE GAZ LACRYMOGÈNE ?

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Les manifestations pacifiques ou plus radicales sont souvent contrôlées et dispersées par l’usage de gaz lacrymogène. Si ce type de répression ne blesse personne directement, les gaz émis sont potentiellement très dangereux pour la santé.

« Apportez-moi du coca s’il vous plaît. À l’aide ! Je ne peux pas respirer ! » C’est le cri de Junior Jean François, âgé de 27 ans, appuyé contre le mur de l’hôtel Le Plaza, aux alentours du Champ-de-Mars, après que des agents de police (UDMO, CIMO) ont fait usage de gaz lacrymogène pour disperser la manifestation anti-gouvernementale du 7 février 2019.

Les manifestations de rue – forme d’expression populaire en vogue depuis plusieurs décennies – sont souvent accompagnées par la Police Nationale d’Haïti. Mais lors des affrontements, les policiers utilisent fréquemment le gaz lacrymogène à l’encontre des manifestants. Ce gaz est une arme chimique interdite dans les conflits armés, mais acceptée pour les interventions de maintien de l’ordre, par le protocole de Genève de 1925 et par la Convention sur l’interdiction des armes chimiques de 1993.

Pourquoi les forces de l’ordre utilisent-elles cette arme chimique ?

Le gaz lacrymogène utilisé par la Police Nationale d’Haïti prend souvent la même forme que les bombes aérosol utilisées par les artistes de rue. Pour Grégory Estimé, « il permet de tenir à distance les manifestants qui veulent entrer de force dans un périmètre de sécurité ». Âgé de 38 ans, cet agent de premier grade du Corps d’intervention et de maintien de l’ordre (CIMO) est père de trois enfants. La structure dont il fait partie au sein de la PNH se charge d’encadrer les rassemblements, manifestations et autres mouvements de contestation populaire.

Souvent, les manifestants essaient de piller et d’incendier des magasins sur leur passage et/ou de changer la trajectoire annoncée. En d’autres occasions, les protestataires tentent d’incendier ou de saccager des bâtiments publics et privés à coups de pierres. Selon un agent de la Brigade d’Opération et d’Intervention Départementale (BOID) qui requiert l’anonymat parce qu’il n’est pas autorisé à parler au nom du corps, « dans ces cas, les soldats peuvent faire directement usage de ce gaz s’ils ne peuvent défendre autrement le terrain qu’ils occupent».

Le gaz lacrymogène se disperse dans un grand périmètre. Ceci explique pourquoi certaines personnes souffrent de ces émanations irritantes alors qu’elles sont chez elles ou dans un centre hospitalier par exemple.

Quels sont ses effets ?

Selon Ricardo Mirlien, un résident de l’Hôpital de l’université d’État d’Haïti, le gaz lacrymogène le plus couramment utilisé contient l’agent chimique 2- chlorobenzaldène malononitrile (appelé aussi « CS », des initiales de Corson et Stoughton, chimistes qui ont synthétisé la molécule). « Malgré son nom, le gaz lacrymogène n’est pas un gaz, mais un aérosol. Le CS est solide à la température ambiante. Mélangé à des agents de dispersion liquides ou gazeux il devient une arme conçue pour activer les nerfs sensibles à la douleur » explique le jeune médecin qui affirme que le gaz lacrymogène agit en irritant les muqueuses des yeux, du nez, de la bouche et des poumons.

Gregory Estimé ajoute qu’en général, les effets se manifestent au bout de 30 secondes environ. La victime ressent une vive brûlure des yeux qui deviennent larmoyants sous l’effet de l’irritation, des difficultés à respirer, des douleurs thoraciques, une salive excessive et une irritation de la peau. « Je sais aussi que suite à une exposition importante certains peuvent également souffrir de vomissements et de diarrhée», conclut-il.

D’après une étude de l’université de Yale, le gaz lacrymogène n’a pas seulement des effets irritants : il s’agit surtout d’un gaz neurotoxique. L’exposition prolongée à ce gaz peut causer des problèmes respiratoires sérieux, voire des crises cardiaques.

Ces gaz toxiques sont rapidement absorbés par voie pulmonaire, fait savoir le Dr Evens P. Vixamar, médecin-interne à l’hôpital de l’Université d’État d’Haïti. « Une grande partie est hydrolysée puis éliminée par les reins dans les urines. Cette réaction est plus aiguë chez les personnes souffrant de maladies chroniques respiratoires, les femmes enceintes, les bébés » explique le médecin qui pense qu’on devrait limiter son usage aux cas extrêmes par des policiers autorisés.

Lorsqu’une personne âgée ou un bébé inhale du gaz lacrymogène, elle risque de mourir. « Cette issue fatale, lors d’expertise médico-légale, est due soit à une atteinte pulmonaire et/ou une asphyxie », poursuit le médecin interne.

Comment se protéger ?

« J’apporte toujours des bouteilles de coca ou des morceaux de citron toutes les fois que je participe à une manifestation. Le citron est ma meilleure défense contre les effets du gaz lacrymogène lancé par les forces de l’ordre» raconte Schneider Gentil, un habitué des manifestations. Il utilise du coca pour se laver le visage et un morceau de citron pour se frotter le nez et les yeux. Cela lui permet de respirer avec moins de difficultés.

Pour mieux se protéger des gaz lacrymogènes, le médecin Ricardo Mirlien explique qu’il faut s’éloigner le plus possible de l’endroit d’émanation de la substance. “Ne vous touchez pas le visage et ne vous frottez pas les yeux. Il faut se moucher et cracher, pour évacuer les produits chimiques ». Il affirme que le vinaigre et le citron permettent de diminuer la toxicité de ces gaz en réagissant avec eux. « Il est donc conseillé d’imbiber les mouchoirs avec du vinaigre ou du jus de citron pour  se recouvrir le visage et respirer moins ces toxiques, » ajoute le résident de l’HUEH.

Dr Evens P. Vixamar conseille aux asthmatiques d’avoir toujours à portée de main leurs pompes respiratoires. Sinon, faute d’une assistance médicale immédiate, ils pourraient mourir par asphyxie.

Pour se protéger les yeux, le médecin interne recommande d’éviter de porter des lentilles de contact lorsqu’on risque d’être exposé au gaz lacrymogène. « Le gaz peut se coincer sous les lentilles et endommager la vue. En cas d’exposition au gaz avec des lentilles, il est conseillé de les faire retirer rapidement par quelqu’un dont les mains n’ont pas été contaminées» relate-t-il. Le spécialiste rappelle qu’il ne faut surtout pas se frotter les yeux, ce qui active les larmes et donc la réaction allergique et la douleur. Il conclut : « La meilleure solution consiste à rincer abondamment les yeux à l’aide d’un sérum physiologique. L’eau pure peut parfois augmenter la douleur si elle n’est pas versée en abondance car elle dissout les cristaux déposés par le gaz ».

Snayder Pierre Louis

Image : Jean Marc Hervé Abelard

Des tranchées de 1914 à Notre-Dame-des-Landes Gaz lacrymogène, des larmes en or

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Comme les manifestants français — ceux de Mai 68, mais aussi ceux qui se mobilisent pour la « zone à défendre » de Notre-Dame-des-Landes ou contre la sélection universitaire à Nanterre —, les protestataires du monde entier font une expérience commune : l’inhalation de gaz lacrymogène. En un siècle, cette arme présentée comme inoffensive s’est imposée comme l’outil universel du maintien de l’ordre.par Anna Feigenbaum Gaz lacrymogène, des larmes en or↑play

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Danielle Tunstall. — « Gas Mask » (Masque à gaz), vers 2000Creative Commons CC0 – pixabay.com

Contrairement à d’autres marchés, l’industrie du maintien de l’ordre ne craint ni les troubles sociaux ni les crises politiques — bien au contraire. Les révoltes du « printemps arabe » en 2011 et les manifestations qui ont ébranlé le monde ces dernières années ont fait exploser les ventes de gaz lacrymogène et d’équipements antiémeute. Carnets de commandes en main, les commerciaux sillonnent la planète. Des armées d’experts se tiennent à l’affût du moindre frémissement populaire pour conseiller fabricants et acheteurs sur les bonnes affaires du jour. Le gaz lacrymogène est sans conteste leur produit-vedette : universellement considéré par les gouvernements comme le remède le plus fiable et le plus indolore à la contestation sociale, comme une panacée contre le désordre, il ne connaît ni frontières ni concurrence.

Quels dommages cause-t-il à ses victimes ? Quels problèmes pose-t-il en matière de santé publique ? Nul ne le sait, car personne ne s’en soucie. Dans aucun pays il n’existe d’obligation légale de recenser le nombre de ses victimes. Aucune obligation non plus de fournir des données sur ses livraisons, ses usages, les profits qu’il génère ou sa toxicité pour l’environnement. Depuis presque un siècle, on nous répète qu’il ne fait de mal à personne, que ce n’est rien de plus qu’un nuage de fumée qui pique les yeux. Quand des gens en meurent — l’organisation Physicians for Human Rights a par exemple comptabilisé trente-quatre morts liées à l’usage de gaz lacrymogène lors des manifestations à Bahreïn en 2011-2012  (1) —, les pouvoirs publics rétorquent qu’il s’agit simplement d’accidents.

En réalité, le gaz lacrymogène n’est pas un gaz. Les composants chimiques qui produisent l’épanchement lacrymal — du latin lacrima, « larme » — portent les jolis noms de CS (2-chlorobenzylidène malonitrile), de CN (chloroacétophénone) et de CR (dibenzoxazépine). Ce sont des agents irritants que l’on peut conditionner aussi bien sous forme de vapeur que de gel ou de liquide. Leur combinaison est conçue pour affecter simultanément les cinq sens et infliger un trauma physique et psychologique. Les dégâts que le gaz lacrymogène occasionne sont nombreux : larmes, brûlures de la peau, troubles de la vue, mucosités nasales, irritations des narines et de la bouche, difficultés à déglutir, sécrétion de salive, compression des poumons, toux, sensation d’asphyxie, nausées, vomissements. Les « lacrymos » ont aussi été mis en cause dans des problèmes musculaires et respiratoires à long terme (2).

Une forme « humaine » de violence d’État

Le recours à l’arme chimique remonte au moins à l’Antiquité. Pendant la guerre du Péloponnèse, les belligérants utilisaient des gaz sulfureux contre les cités assiégées. Mais c’est au milieu du XIXe siècle que les progrès de la science ont lancé les débats éthiques sur son usage. Les premières tentatives de restreindre l’utilisation d’armes chimiques et biologiques remontent aux conférences de La Haye de 1899 et 1907, mais leur formulation ambiguë réduisit ces accords à peu de chose. La première guerre mondiale allait servir ensuite de laboratoire à ciel ouvert pour l’élaboration d’une nouvelle gamme de poisons.

Il est généralement admis que les troupes françaises ont inauguré le règne du lacrymogène lors de la bataille des frontières d’août 1914, en tirant dans les tranchées adverses des grenades remplies de bromacétate d’éthyle — une substance irritante et neutralisante, mais non létale à l’air libre. Les Allemands répliquèrent en avril 1915 par un produit infiniment plus mortel, le gaz moutarde, ou ypérite — le premier cas dans l’histoire d’usage massif d’une arme chimique au chlore.

D’abord distancés dans cette course à l’innovation, les Américains n’allaient pas tarder à rattraper leur retard. Le jour même de leur entrée en guerre, les États-Unis créent un comité de recherche « pour mener des investigations sur les gaz toxiques, leur fabrication et leurs antidotes à des fins de guerre (3 », mais aussi un service de la guerre chimique (Chemical Warfare Service, CWS), généreusement doté en moyens et en effectifs. En juillet 1918, le sujet monopolise l’attention de près de deux mille scientifiques.

Après le conflit, les militaires se montrent divisés. Ceux qui ont vu de leurs yeux les ravages causés par l’arme chimique dénoncent son caractère inhumain, aggravé par la peur et l’anxiété qu’elle propage. Les autres lui trouvent une certaine magnanimité, au motif qu’elle ferait moins de morts qu’un feu roulant d’artillerie. Un biochimiste de Cambridge, John Burdon Sanderson Haldane, plaide pour l’efficacité des gaz de guerre, taxant leurs détracteurs de sentimentalisme : si l’on peut « se battre avec une épée », pourquoi pas « avec du gaz moutarde » ?

Pour l’historien Jean Pascal Zanders, les controverses qui ont suivi la première guerre mondiale nous ont légué un double héritage (4). D’une part, elles ont consacré la distinction entre les « gaz toxiques » — dont on débattit autrefois à La Haye — et les nouvelles armes chimiques inventées entre 1914 et 1918. Ce distinguo réapparaîtra à maintes occasions dans les conventions internationales, légitimant que l’on interdise certaines armes pour en approuver d’autres, présentées comme non létales. C’est en vertu de ce raisonnement que le gaz lacrymogène a emprunté une voie légale plus favorable que d’autres agents toxiques. D’autre part, on prend alors très à cœur les intérêts commerciaux liés à l’expansion de l’industrie chimique. Brider sa créativité dans le domaine militaire lui porterait un préjudice insupportable — un argument toujours en vigueur un siècle plus tard. À partir du traité de Versailles (1919) et du protocole de Genève (1925), les intérêts économiques des puissances alliées vont ainsi se fondre dans le droit international. La page de la guerre étant tournée, maintenir la paix à l’intérieur de leurs frontières — et à l’extérieur, dans leurs dépendances coloniales — devient une priorité pour les Américains et les Européens. D’où leur intérêt croissant pour les gaz lacrymogènes, dont le CWS et son directeur, le général multimédaillé Amos Fries, seront les ardents pionniers.

Les années 1920 annoncent l’âge d’or du « lacrymo ». Capitalisant sur l’essor des armes chimiques durant la guerre, Amos Fries convertit ce venin en outil politique à usage quotidien. Grâce à un lobbying acharné, il parvient à modeler une nouvelle image du gaz lacrymogène, assimilé non plus à une arme toxique, mais à un moyen inoffensif de préserver l’ordre public. Flanqué d’un avocat et d’un officier, il rallie à sa cause un large réseau de publicitaires, de scientifiques et d’hommes politiques chargés de promouvoir dans les médias ces « gaz de guerre pour temps de paix ».

La presse économique se montre logiquement la plus empressée à diffuser le refrain du « gaz pour la paix ». Dans son numéro du 6 novembre 1921, la revue Gas Age-Record dresse un portrait extasié du général Fries. On peut y lire que le « chef dynamique » du CWS a « étudié de près la question de l’usage du gaz et des fumées pour affronter les foules et les sauvages. Il est sincèrement convaincu que lorsque les officiers de police et les administrateurs coloniaux seront familiarisés avec le gaz en tant que moyen de maintenir l’ordre et de protéger le pouvoir, les désordres sociaux et les insurrections sauvages diminueront jusqu’à disparaître totalement. (…) Les gaz lacrymogènes paraissent admirablement appropriés pour isoler l’individu de l’esprit de la foule. (…) L’un des avantages de cette forme adoucie de gaz de combat tient au fait que, dans son rapport à la foule, l’officier de police n’hésitera pas à s’en servir ».

Cet échantillon précoce d’argumentaire promotionnel tient en équilibre sur un fil étroit : vanter les vertus répressives du produit tout en célébrant son caractère indolore. L’engouement pour les gaz lacrymogènes sur un marché qui, jusque-là, ne connaissait que la matraque et le fusil doit beaucoup à cet art de réconcilier les antagonismes. Le gaz s’évapore. La police peut enfin disperser une manifestation avec « un minimum de publicité négative (5 », sans laisser dans son sillage du sang et des ecchymoses. Au lieu d’être perçu comme une forme de torture physique et psychologique, le « lacrymo » s’impose dans les esprits comme une forme « humaine » de violence d’État.

Outre leurs prestations à la radio et dans les journaux, le général et son équipe organisent des démonstrations publiques. Un beau jour de juillet 1921, un vieil ami et collègue de Fries, Stephen J. De La Noy, se poste avec une cargaison de gaz sur un terrain près du centre de Philadelphie. Afin d’illustrer les bienfaits de son arsenal, il a invité les policiers de la ville à tester la marchandise. Les journalistes viennent en nombre pour immortaliser la scène : deux cents agents en uniforme se faisant gazer en pleine figure.

Il faut attendre quelques années pour passer de l’expérimentation aux travaux pratiques. L’occasion se présente le 28 juillet 1932, quand la garde nationale reçoit l’ordre de disperser des milliers de vétérans de la première guerre mondiale rassemblés devant le Capitole, à Washington. Surnommés « l’armée bonus », ces anciens soldats occupent les lieux avec leurs familles pour exiger le paiement d’un reliquat de salaire que leur ministère rechigne à débloquer. Une pluie de grenades lacrymogènes s’abat sur la foule, provoquant un mouvement de panique. L’évacuation brutale se solde par quatre morts, cinquante-cinq blessés et une fausse couche. Parmi les victimes, un enfant mort quelques heures après l’assaut — officiellement des suites d’une maladie, mais le fait d’avoir respiré le gaz empoisonné « n’a sûrement pas aidé », dira un porte-parole de l’hôpital.

Chez les vétérans expulsés, le gaz lacrymogène est rebaptisé « ration Hoover », en référence au président Herbert Hoover (1929-1933), qui leur a envoyé la troupe ; par allusion aussi aux inégalités sociales qui se creusent dans le pays. Pour les chefs de la police, les industriels et leurs représentants, en revanche, l’opération a été un succès. Le service des ventes de Lake Erie Chemical, la société productrice du gaz utilisé au Capitole, se fait un plaisir d’inclure des clichés de l’évacuation sanglante dans son catalogue. Plus tard y figureront aussi des images de grévistes de l’Ohio et de Virginie détalant sous les nuages de gaz. « Un seul homme équipé de gaz Chemical Warfare peut mettre en fuite mille hommes en armes » : le slogan orne fièrement les plaquettes publicitaires. Le fabricant se vante de fournir une « explosion irrésistible de douleur aveuglante et suffocante », dont il garantit cependant qu’elle n’occasionne « aucune blessure durable » — toujours le marketing de l’équilibre. Durant la Grande Dépression, dans les années 1930, les États-Unis recourent de plus en plus aux gaz lacrymogènes pour étouffer la contestation sociale. Selon un comité du Sénat, les achats de gaz entre 1933 et 1937, effectués « principalement à l’occasion ou en prévision de mouvements de grève », se montent à 1,25 million de dollars (21 millions de dollars en valeur actuelle, ou 17 millions d’euros).

Autre débouché prometteur pour l’industrie de la « douleur aveuglante et suffocante » : les colonies. En novembre 1933, sir Arthur Wauchope, le Haut-Commissaire britannique en Palestine, réclame sa part du produit miracle. Dans un courrier au bureau des colonies, il plaide : « Je considère que le gaz lacrymogène serait un agent hautement utile entre les mains des forces de police en Palestine pour disperser les rassemblement illégaux et les foules émeutières, particulièrement dans les rues tortueuses et étroites des vieux quartiers de la ville, où l’usage d’armes à feu peut provoquer des ricochets conduisant à des pertes disproportionnées en vies humaines. »

Dispersion et démoralisation

Une demande similaire émane en 1935 de la Sierra Leone, où les administrateurs coloniaux sont confrontés à des grèves pour des augmentations de salaire. Puis c’est au tour de Ceylan, le futur Sri Lanka. Instruction est donnée au nouveau secrétaire d’État aux colonies britannique, Malcolm MacDonald, d’élaborer une politique globale du gaz lacrymogène. À cette fin, il dispose d’une liste recensant les lieux où cette arme a fait la preuve de son efficacité : en Allemagne, où elle a servi contre les grévistes de Hambourg en 1933 ; en Autriche, où elle a excellé contre les communistes en 1929 ; en Italie, où elle vient d’être incorporée à l’équipement de base des forces de l’ordre ; ou encore en France, où son usage est déjà banalisé.

Durant cette période, le gaz lacrymogène devient pour les États un moyen privilégié de faire obstacle aux demandes de changement. Sa fonction bifide, à la fois physique (dispersion) et psychologique (démoralisation), paraît idéale pour contenir les tentatives de résistance aux mesures impopulaires. Comme, de surcroît, on peut désormais gazer en toute légalité des manifestants pacifiques ou passifs, les autorités n’ont plus à s’inquiéter des luttes collectives non violentes. Le « lacrymo » s’est imposé comme une arme multifonction capable non seulement de stopper une manifestation, mais aussi de saper toute forme de désobéissance civile.

Cette fonction politique a perduré jusqu’à aujourd’hui. Alors que l’usage de toutes les armes chimiques est interdit par les traités internationaux dans le cadre des guerres, les forces de l’ordre restent, au niveau national, plus que jamais autorisées à déployer du gaz toxique sur les individus ou les cortèges de leur choix. Un policier peut ainsi arborer un atomiseur de gaz lacrymogène à sa ceinture, tandis qu’un militaire n’en a pas le droit. L’acceptation quasi unanime de cette incohérence contribue pour beaucoup à la florissante prospérité de l’industrie du maintien de l’ordre — et aux larmes des contestataires du monde entier.

Anna FeigenbaumChercheuse à l’université de Bournemouth (Royaume-Uni). Auteure de Tear Gas. From the Battlefields of World War I to the Streets of Today, Verso, Londres, 2017.

(1) « Tear gas or lethal gas ? Bahrain’s death toll mounts to 34 », Physicians for Human Rights, New York, 16 mars 2012.

(2) « Facts about riot control agents », Centers for Disease Control and Prevention, Atlanta, 21 mars 2013.

(3) Cité dans Gerard J. Fitzgerald, « Chemical warfare and medical response during World War I », American Journal of Public Health, no 98, Washington, DC, avril 2008.

(4) Jean Pascal Zanders, « The road to Geneva », dans Innocence Slaughtered. Gas and the Transformation of Warfare and Society, Uniform Press, Londres, 2016.

(5) Seth Wiard, « Chemical warfare munitions for law enforcement agencies », Journal of Criminal Law and Criminology, vol. 26, no 3, Chicago, automne 1935.

Lire aussi le courrier des lecteurs dans notre édition de juin 2018.

The gas – Let’s make it a what if…

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There is a lot of talk about the gas being used during the protests by police. Streets are absolutely filled with it and there is no way of escaping it. The police block the roads from all sides except for one or two, usually smaller street, shoot gas in that street and start pushing the people into the streets. No escape possible. They confiscate all the protection against the gas. Not only proper gas masks but als dust masks, that hardly help anyway, ski glasses, swimming glasses, etcetera. Now it is legal to do so, thanks to the anti-hooligan law, but they did that before the law was passed. So. There is word that the gas raises the cyanide levels in the body (when you smoke times 7). There is a natural level in the blood and the gas raises these levels. It is absorbed through skin and by breathing. The cyanide is actually turned into Thiocyanate. Analysis have been done but nothing is 100% proven. Not that it is true, not that it is false. The sounds about the truth go both ways. So for safety purposes let’s assume a “what if it is true”.
What are the symptoms?
What are the consequenses?
And what can you do about it? The symptoms are almost the same as when you have a lack of oxygen. As you can imagine this is very dangerous and even lethal, and if it doesn’t kill you it does have long term after affects, including severe braindamage. On the day of being gassed you can experience
– dizziness
– disorientation
– loss of consciousness
The gas also burns on your skin, in your eyes, mouth and throat and makes your eyes tear, your nose run and you will produce a lot saliva. The days after being gassed you can experience
– exhaustion (cyanide is turned into thiocyanate and this makes the liver work very hard)
– women can have abundant periods (because of the lack of oxygen it can change the regular menstrual cycle)
– muscle cramps (thanks to the lack of oxygen and iron levels can drop) Especially women that are pregnant or are trying to get pregnant should be very careful. Research has shown that the lack of oxygen can lead to malformation of the unborn baby. And can even lead to miscarriages. So what can you do about it?
Staying out of the gas is not always possible. You can get caught up in it even if you have no intention of being at the protest.
And gas masks can help, but can also be confiscated and that doesn’t prevent the gas molecules from entering your body through your skin.
If you have been exposed to the gas it is very important that you take good care of yourself, take a lot of rest and watch what you eat, drink and do to help your liver to process the toxic molecules that entered your body. Good for the liver are:
– food with a lot of fibers like oatmeal
– broccoli
– coffee (two or three cups a day)
– green tea
– water
– nuts, especially almonds
– spinach
– blueberries
– dark chocolate
– olives
– plums
– oregano
– sage
– rosemary
– cinnamon
– curry powder
– cumin
– meat
– dairy (low fat)
– work out / excercise Not good for the liver are
– fatty foods like french fries and burgers
– sugar
– processed food like bacon or deli meats
– canned vegetables
– a lot of salt
– alcohol is really bad for the liver
– potato chips and baked snacks
– white bread
– white rice
– regular pasta
– limit red meat
– avoid cleaning products, insecticides, chemicals and additives Just in case the what if… turns out to be true… Personally I have experienced some of the symptoms. Muscle pains, extreme tiredness, strange period cycle. But I can also find other excuses for that. A lot of walking, high stress levels, illness due to being soaking wet from rain and water tank. Fact is neither has been really proven yet. So just in case it turns out to be true… take all the above in consideration… Sources:
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/books/NBK224932/
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4113303/ “ Tear gas containing ortho chlorobenzylidene malonitrile wis labeled « CS » gas was first synthetized in 1928 (1) and used in military applications, especially in Vietnam conflict (2) before being banned for military application in 1998.
This molecule can be absorbed through skin and respiratory tract (3). Once in blood, it is metabolized into malononitrile, which is in turn metabolized into cyanide (3).
Cyanide is then processed very quickly into Thiocyanate because of its high toxicity.” https://www.facebook.com/SOS.ONU.Officiel/photos/a.402904336934361/412172356007559/?type=3&theater
https://www.facebook.com/SOS.ONU.Officiel/photos/a.402904336934361/411880906036704/?type=3&theater
https://www.facebook.com/SOS.ONU.Officiel/photos/a.402904336934361/408074539750674/?type=3&theater
https://www.facebook.com/photo.php?fbid=10213284494658585&set=p.10213284494658585&type=3&theater (1) Corson, Ben B.; Stoughton, Roger W. (1928). « Reactions of Alpha, Beta-Unsaturated Dinitriles ». Journal of the American Chemical Society. 50 (10): 2825–2837.
(2) WHO (World Health Organization). Health Aspects of Chemical and Biological Weapons; Geneva, Switzerland. 1970. [Dec. 30, 2013].
(3) Olajos EJ, Salem H. Riot control agents: pharmacology, toxicology,biochemistry and chemistry. J Appl Toxicol. 2001 Sep-Oct;21(5):355-91. Review. PubMed PMID: 11746179. 1) Normal thiocyanate levels (µM to mg/l conversion : x0.058)
http://jhs.pharm.or.jp/data/46(5)/46(5)p343.pdf
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC6307002/
https://www.researchgate.net/publication/6885967_Serum_thiocyanate_levels_in_smokers_passive_smokers_and_never_smokers
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/6502741?fbclid=IwAR2TSI51wYEg8_zdwpJSsloBVu0UQ2cirHOZLbny_NnzvJYZd8jCG-LNDMY
https://onlinelibrary.wiley.com/doi/pdf/10.1002/3527600418.bi5712sale0013 2) CS to cyanide metabolism
https://www.tandfonline.com/doi/abs/10.3109/00498258709044190
https://link.springer.com/article/10.1007/BF00310388
https://books.google.fr/books?id=wKtsL8KHoPsC&pg=PA43&lpg=PA43&dq=Malononitrile+metabolism&source=bl&ots=UhLI370t2j&sig=ACfU3U2P2lURVmxv8xBGlsUK5FTCNfZvMQ&hl=fr&sa=X&ved=2ahUKEwikk7j17bnhAhWSlRQKHWNaBGAQ6AEwBHoECAoQAQ&fbclid=IwAR0B_UtVPJ1gjdSR9Wl5fx4-rPGBER4DbKOmhXsXahSYk3N4LCj8mydL_pw#v=onepage&q=Malononitrile%20metabolism&f=false
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/14790882
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/11746179
3) pr. Massimo Zucchetti https://it.wikipedia.org/wiki/Massimo_Zucchetti
https://www.researchgate.net/publication/305215203_Damage_to_Man_and_Environment_of_Tear_Gas_CS
https://www.researchgate.net/publication/309591686_Toxicity_and_Health_Effects_of_Ortho-chloro-benzylidene-malononitrile_CS_gas
4) Other CS effects :
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/28972257
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25633030
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25572084
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/25003867
https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/20972236
5) WACO :
http://www.veritagiustizia.it/docs/gas_cs/CS_Effects_Waco.pdfhttps://vigimi.fr/f/actualites-fr/entry/la-presidence-et-le-gouvernement-des-armes-chimiques-contre-ses-citoyens-et-sa-police?fbclid=IwAR08aR0KdTDKGGEUWIjFVMC80KCt0Ywsf9vTas7RHS669dRoLw7cAdLgRt4